Le Huffington Post – « L’égalité des chances est aussi un challenge économique ! »

Le Huffington Post – « L’égalité des chances est aussi un challenge économique ! »

Retrouvez infra la tribune de Jean-Luc Monteil, président du MEDEF Provence-Alpes-Côte d’Azur, publiée dans Le Huffington Post.

 

« L’égalité des chances est aussi un challenge économique ! »

Le dernier rapport de France Stratégie jette une lumière nouvelle sur le coût économique des discriminations. La France, privée de croissance et de plein emploi depuis bientôt deux décennies, devrait en faire une grande cause nationale.

L’égalité des chances et la lutte contre les discriminations sont devenues depuis plusieurs années déjà des enjeux majeurs de notre société. Qu’il s’agisse de promouvoir l’égalité femme/homme, de favoriser l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap ou des jeunes issus des quartiers populaires, les chantiers sont nombreux. Au-delà de l’entorse au principe républicain d’équité qui interpelle naturellement tout citoyen, force est de constater -à l’aune des travaux engagés depuis presque dix ans par de nombreux économistes- que les discriminations constituent également un manque à gagner non négligeable pour nos entreprises.

En effet, en matière d’égalité femme/homme, plusieurs études ont démontré que l’équilibre entre les sexes dans les postes de leadership au sein des entreprises est un outil de rentabilité substantiel. Pour preuve, le cabinet McKinsey a réalisé en 2014 une étude sur la performance financière de 89 entreprises internationales. Résultat: celles dont la mixité est la plus importante au sein des fonctions managériales sont synchroniquement celles bénéficiant des meilleures performances économiques. Dans la même veine, Michel Ferrary, professeur associé à la SKEMA Business School et spécialiste des questions de genre, s’est concentré sur les grands groupes tricolores. Selon lui, « les entreprises du CAC 40 qui ont plus de 35% de cadres féminins ont connu une croissance de chiffre d’affaires de 23,54% sur la période 2002-2006, contre 14,61% dans les sociétés qui ont moins de 35% de femmes cadres« .

BNP Paribas par exemple, la banque qui a le mieux résisté à la crise, est également l’établissement bancaire le plus féminisé (41,4%) alors que Dexia, la banque française ayant essuyé les pertes les plus importantes, est l’un des établissements bancaires les moins féminisés du Vieux Continent (18,4%). Rappelons qu’en moyenne, la proportion des entreprises de l’Hexagone qui comptent plus de 20% de femmes dans leurs conseils d’administration stagne sous la barre des 15% et, selon KPMG, seules 14% d’entre elles occupent des postes de direction alors qu’elles représentent 48% de la population active.

Le manque à gagner ne s’arrête bien entendu pas aux portes de l’égalité femme/homme. En effet, force est de reconnaître que la France se prive aujourd’hui d’une grande partie de ses talents dits « de la diversité ». Selon l’Observatoire national des zones urbaines sensibles, la pauvreté est dans nos quartiers les plus populaires trois fois supérieure à la moyenne nationale; un jeune sur deux vit ainsi sous le seuil de pauvreté. Subséquemment, l’écart de revenu moyen entre ces zones sensibles et le reste du territoire n’a eu de cesse de se creuser depuis plus d’une décennie.

Aucun gouvernement -de droite comme de gauche- n’étant parvenu à infléchir cette situation dont on ne parle qu’au moment des élections. Frôlant les 25%, le chômage est quant à lui presque trois fois plus élevé que partout ailleurs dans l’Hexagone. Et ce sont les 15-24 ans qui en font particulièrement les frais: 43% des actifs et 37% des actives de cette tranche d’âge sont ainsi sans emploi. Des chiffres qui donnent le tournis!

Dans ce contexte, le dernier rapport de France Stratégie sur le coût économique des discriminations apporte une nouvelle pierre à notre conviction. Qu’on le veuille ou non, loin d’être une ambition cosmétique, l’égalité des chances concourt à la croissance française ainsi que, plus globalement, à la cohésion nationale. Selon les différents scénarii élaborés par les experts de l’institution rattachée à Matignon, le manque à gagner oscille entre 3% et 14% du PIB. La France, privée de croissance et de plein emploi depuis bientôt deux décennies, n’a pas les moyens de détourner le regard.

22/09/16
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